Saurons-nous transformer la crise en opportunité?
Un des marchés les plus abusifs et planifiés d'Israël est ébranlé par une réalité géopolitique imprévue. Les israéliens ploient sous le coût de la vie. Et si c'était l'occasion d'un changement?
Au programme
Au supermarché : un produit décrypté 🥚
Portefeuille : un chiffre à la une 📈
Smart conso : un bon réflexe 🤡
Pour en savoir un peu plus
Si ce n’est pas déjà fait, vous pouvez aussi :
Kadima👇
Les oeufs 🥚
La guerre c’est l’incertitude, la destruction, l’angoisse. Mais aussi un fort impact sur l’économie. Un exemple frappant nous en est donné par le produit du jour : les œufs. Décryptage.
Le marché des œufs en Israël fonctionne presque comme celui du lait. Une planification de bout en bout et un système à bout de souffle. L’Etat et le Commissariat aux Poulaillers - une guilde professionnelle défendant les intérêts des producteurs - fixent ensemble des quotas de production annuels obligatoires, inférieurs à la consommation prévue.
Ça s’appelle très officiellement un cartel (non, le cartel ce n’est pas qu’à Medellin, c’est tout marché dans lequel les producteurs s’entendent sur les prix).
On garantit ainsi la vente de la totalité des œufs produits tout en créant des pénuries structurelles, qui nécessitent de recourir régulièrement à l’importation. Et on fournit aux médias des gros titres hystériques avant les fêtes, du style “Y aura-t-il des kneidlech dans la soupe de poulet cette année?'"
🫰 Le prix à la consommation très élevé est également fixé par l’Etat : + 41 % que l’OCDE et + 72 % que les États-Unis. On finance - je veux dire, vous et moi, finançons - le revenu d’exploitations parfois minuscules, mais nombreuses - il y en a 1.650 - et très actives politiquement - le fameux lobby agricole. Cela les débarrasse de toute incitation économique à être productives et compétitives. Le ministère des Finances estime que le consommateur israélien finance de sa poche un surcoût d’un demi-milliard de shekels par an en raison du prix élevé des œufs.
🙈🙉🙊Cette coupable indulgence et cette cartélisation ont - quelle surprise - donné naissance à une réalité effrayante sur le terrain : surpopulation, maladies, pollution…
Quelques chiffres :
🔸94% d’exploitations vétustes : elles ont été créées dans les années 50 et 60.
🔸70% se trouvent dans le Nord.
🔸7 % sont bio ou d’élevage en plein air, contre 52 % en UE (et 60% en France).
🔸76 % des poules élevées dans des conditions non conformes aux standards internationaux, surtout en cage.
🔸95 % des exploitations fonctionnent sans licence ni contrôle.
🏛️En 2007 et en 2021, le gouvernement a tenté de réformer le secteur : fermer ou moderniser les exploitations non conformes, en créer dans le Centre. Il s’est heurté à un mur de députés, opposition comme coalition, défendant le système bec et ongles. Les choses étaient parties pour ne jamais changer. Sauf que…
💣La guerre a éclaté. Je le rappelle, 70% des exploitations sont situées dans le Nord, sous les bombes. Le vétérinaire en chef du ministère de l’Agriculture a adressé une lettre urgente aux producteurs en décembre les priant de s’organiser pour déplacer leurs exploitations vers le centre d’Israël en cas d’escalade. Il s’agit de répartir les risques sécuritaire et sanitaire, afin d’assurer l'approvisionnement en œufs des Israéliens, parmi les plus gros consommateurs du monde. Logique dans le fond.
🔥Une guerre éclate en marge de la guerre. Les producteurs accusent le gouvernement de chercher à les éliminer en utilisant la guerre pour les obliger à moderniser, et encourager la construction de poulaillers neufs dans le Centre. Le ministère de l’Agriculture a compris dès octobre que la guerre pourrait créer une (vraie) pénurie et porter atteinte à la sécurité alimentaire du pays : il a ouvert des quotas d’importation de 50 millions d'œufs. Le ministère des Finances, lui, voudrait bien moderniser la filière et démanteler le cartel.
Alors oui, la guerre c’est l’angoisse et la destruction, mais dans ce cas précis, je me permets d’utiliser un cliché et de dire que la crise pourrait constituer une opportunité.
68%
C’est le pourcentage de ménages qui ne parviennent pas à épargner en Israël.
L’indice de la confiance des consommateurs est au plus bas. Cet indice s’appuie sur une évaluation par les ménages de leur situation économique, entre -100 (complètement pessimiste) et +100 (complètement optimiste). En février cet indice était à -49, soit très bas.
Que ce soit parce qu’ils sont endettés, que leur revenu couvre tout juste leurs dépenses, ou qu’ils doivent puiser dans leurs économies pour rester à flots, on constate une tendance très nette qui contribue au pessimisme. Même si les raisons de ces difficultés sont multiples, les dirigeants politiques comme les entreprises feraient bien de penser au bien-être des Israéliens et de contribuer à une amélioration via des mesures de modération des prix du logement, à l’encouragement de la concurrence dans le secteur bancaire et commercial, et à l’arrêt des augmentations de prix. On n’en peut plus !
🤡
Hag Purim Sameah !
Ne nous laissons pas culpabiliser par la grande fête de la surconsommation, à trois semaines seulement de Pessah… Les mishlohei manot n’ont pas besoin d’être achetées en quantités nombreuses et à grands frais. Vous pouvez aussi faire simple et maison ! Des contenants durables (j’utilise perso des tasses en verre), deux ou trois gâteries de qualité faites maison, des fruits secs ou du bon chocolat. Pas de gâchis et votre porte-monnaie vous dira merci.
🎙️
J’ai enquêté pendant plusieurs semaines sur le système de financement du Hamas et reconstruit et détaillé les sources et les méthodes qui ont été utilisées pour construire le formidable complexe militaro-industriel qu’est devenue la bande de Gaza. Yaël Bornstein de Kan m’a tendu son micro. Voici l'enquête