La réforme de l'électricité, mode d'emploi
Des torrents de pubs tout l'été avec les plus grosses stars israéliennes n'ont pas aidé : personne ne comprend rien à la réforme de l'électricité. Guide pratique et mes conseils.
Au programme
Un produit décrypté : l’électricité ⚡
Portefeuille : l’étiquetage des produits 📈
Smart conso : un bon réflexe 🛒
Pour en savoir un peu plus 🎙️
Si ce n’est pas déjà fait, vous pouvez aussi :
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Kadima👇
“Danse avec les stars” au lieu de juste nous expliquer
Cet été, nous avons été inondés de campagnes de fournisseurs bien connus d’Internet, de gaz ou de mobile, comme Bezeq ou Amisragaz, faisant une réclame enthousiaste pour des offres imbattables d'électricité. Il s'agit de la réforme du marché de l'électricité, mais vu que l’Etat n’a pas fait de campagne d’information et laissé le terrain à des stars qui qui dansent dans des salons et des cuisines devant des familles émerveillées, on ne comprend pas grand-chose. Décryptage
Image tirée de la publicité télévisée pour Bezeq électricité (You tube)
Quelques informations de base pour démarrer sans court-circuit : le marché de l'électricité israélien est divisé en quatre segments :
La production
L’acheminement
La distribution
La fourniture (vente)
La production se fait dans les centrales électriques de la Hevrat Hachashmal (Compagnie Nationale d’Electricité, que j’appellerai CNE) ou dans des centrales privées.
L’acheminement et la distribution, c’est l’infrastructure qui achemine l'électricité jusque chez vous, les lignes, les poteaux, les accumulateurs et les transformateurs, gérés par une société publique, Noga.
Et la fourniture, qui est la vente au client final, était jusqu’il y a peu un monopole de la CNE.
La réforme de l’électricité, passée en 2018 sous le ministre des Finances Moshe Kahlon, a ouvert les segments de la production et de la fourniture d’électricité à la concurrence.
Pour la production, aujourd'hui, au-delà de la CNE, l’électricité est produite par toute une série d’acteurs, centrales privées ou producteurs d'énergie solaire par exemple. Leurs coûts de production sont fonction de l'efficacité de l'entreprise, mais aussi de l'origine de l'électricité : la production d'électricité solaire est moins chère que la production d'électricité à base de gaz naturel.
Quant à la fourniture aux entreprises et aux particuliers, le secteur s'est ouvert graduellement à la concurrence. En Israël, 3,5 millions de foyers sont reliés à l’électricité et selon la société de fintech Riseup, la facture annuelle moyenne d’électricité d’un foyer israélien serait d’environ 8.400 shekels.
Dans un premier temps, la réforme a été réservée aux entreprises, depuis un an et demi les particuliers possèdant un compteur intelligent en bénéficient, et depuis le 25 juillet 2024, elle s'applique aussi aux ménages qui ont un compteur « ordinaire ».
En juillet et août, près de 80.000 clients ont opté pour la migration de leur compte vers un nouveau fournisseur ( 65% possèdant un compteur intelligent). En tout et pour tout depuis 2023, 130.000 clients ont changé de fournisseur, une goutte d’eau dans l’océan. Cela s’explique assez facilement par un blocage important à l’entrée de la concurrence : le fameux compteur intelligent.
Le compteur si intelligent qu’il bloque la concurrence
900.000 foyers israéliens, soit seulement un quart des usagers, possèdent un compteur intelligent (type Linky) qui permet de mesurer en temps réel leur consommation d’électricité. Ce compteur envoie tous les soirs les données de consommation d'électricité découpées en tranches de 30 minutes, au fournisseur et la société Noga. À noter que les usagers ne peuvent pas décider d'installer un compteur intelligent, mais que celui-ci est installé par la CNE (elle est censée équiper tout le pays avant fin 2028) selon son bon vouloir. L'incitation négative est forte : la CNE traîne des pieds pour installer ces nouveaux compteurs puisque ceux qui les possèdent seront plus enclins à changer de fournisseur.
Car tout est là : avec un compteur intelligent on a accès à des réductions bien plus importantes que si on a le bon vieux compteur idiot. Les fournisseurs privés adaptent l’offre au type de comportement de chaque usager et l’encouragent à consommer aux heures les plus avantageuses pour lui. Il est ainsi récompensé, ce qui n'est évidemment pas possible avec un compteur relevé tous les deux mois. Dans un premier temps le gouvernement avait tablé sur un rythme de remplacement des vieux compteurs par les nouveaux suffisamment élevé pour faire entrer tous les usagers rapidement dans la réforme, mais devant la mauvaise volonté manifestée par la CNE , il a été décidé d'ouvrir la réforme à tous les consommateurs, sachant qu’évidemment, pour les propriétaires de compteurs traditionnels, la réforme est beaucoup moins avantageuse.
Huit fournisseurs privés se sont mis sur les rangs : Electra power, Amisragaz, Bezeq, Cellcom, Partner, Hot, Enova et Pazgaz Le but de la réforme est de permettre aux clients consommateurs de faire jusqu'à 20 % d'économie sur leur facture mensuelle d'électricité.
Le tarif de base servant de référence est celui de la CNE : 61,45 agorot le kWh TTC
Comme beaucoup des réformes destinées à augmenter la concurrence et à faire baisser les prix en Israël, celle-ci n’a pas démarré en flèche. Soixante-dix ans de monopole génèrent une angoisse devant la nouveauté. Le changement de fournisseur prend environ 2 mois, ce qui est long, les usagers craignent d'être coupés du réseau à un moment donné comme cela peut arriver quand on change de fournisseur Internet ou téléphone.
Comment choisir un nouveau fournisseur, et quelle est la réduction ?
Le système ressemble beaucoup à celui du choix d’un fournisseur internet ou d’un opérateur mobile. Vous choisissez un package qui correspond à votre type de consommation et vous évaluez les efforts que vous êtes prêts à faire. Il y a une multitude de comparateurs de prix, dont par exemple kamaze, chashmalit et autres. Sans faire de recommandation, un fournisseur souvent cité comme étant plus avantageux est Pazgas.
Les propriétaires de compteur ordinaire peuvent bénéficier d’une réduction de 5-7% sur leur facture sans tenir compte des horaires de consommation, toujours à partir du tarif de référence de la SNE. Les propriétaires de compteur intelligent peuvent économiser plus d’argent s’ils modifient leurs habitudes de consommation, par exemple si vous êtes chez vous pendant la journée, la plupart des fournisseurs vont proposer une réduction de 15% sur l’électricité consommée entre 7h du matin et 17h. Des réductions pouvant parvenir à 20% pour l’électricité consommée de nuit conviendront mieux aux propriétaires de véhicules électriques pour faire baisser le prix de la recharge. Etc…
Il faut garder simplement à l'esprit que le prix de référence est le tarif officiel de la CNE, et que les comparateurs indiquent des réductions par rapport à ce prix. Ilest recommandé avant de choisir de se munir de quelques factures précédentes pour examiner votre consommation et recalculer selon le nombre de kWh consommés, quelle sera éventuellement votre nouvelle facture quand vous aurez changé de fournisseur.
Une fois qu'on a choisi qu’est-ce qu'on fait ?
Si vous avez un compteur intelligent, il faut contacter le fournisseur choisi et lui fournir :
Le numéro de contrat de SNE et le numéro de consommateur (sur la facture d’électricité),
Le numéro du compteur
Vos coordonnées
Le fournisseur soumettra une demande de portabilité via un système appelé Pla'a (Plateforme de Portabilité Automatisée) géré par Noga. Ensuite, vos données et la conformité du compteur seront vérifiées. Si la demande est valide, une procuration numérique vous sera envoyée par mail ou par SMS. Il faudra la compléter et la signer électroniquement.
Si vous avez un vieux compteur, c’est plus compliqué : en plus de toutes ces démarches, vous devrez prendre une photo de votre compteur les deux derniers jours ouvrables du mois où vous souhaitez démarrer la migration, et les envoyer à la CNE qui est censée les valider à la fin du mois suivant. Près d'un tiers des demandes échouent, donc on peut imaginer que la CNE ne met pas toute la bonne volonté possible à aider ceux qui veulent changer de fournisseur. Forcément, vu qu'elle est partie prenante et qu'elle perd ainsi un client. Quoi qu’il en soit il me semble qu’une réduction de prix de 5% ne justifie pas forcément tout ces efforts et qu’il vaut mieux attendre que la CNE change votre compteur pour y aller.
En résumé la réforme est bonne mais elle nécessite un peu de travail et reste avantageuse pour les seuls possesseurs d’un compteur intelligent.
Sans affichage, les prix font la fête 📈
L’une des lois de protection des consommateurs les plus importantes en Israël est menacée, la mobilisation des consommateurs pourra-t-elle la sauver ? L’Autorité de Protection des consommateurs a reçu des centaines d’oppositions de consommateurs et d’associations contre sa tentative d’annuler l’obligation d’étiquetage des prix.
Cela fait des années que les enseignes font campagne contre cette obligation, qui mobilise de la main d’œuvre et leur coûte soi-disant trop cher. Dans la majorité écrasante des magasins, les consommateurs naviguent à l’aveugle entre des produits mal étiquetés ou pas étiquetés du tout. L’arrivée à la caisse est toujours accompagnée de surprises, bonnes ou mauvaises, et c’est un véritable sport de vérifier que les prix sur le ticket final correspondent à ceux qui étaient affichés sur les produits, ou à ceux que l’on a supposé qu’il devraient coûter.
Au tout début de la guerre, le premier décret pris par le ministère de l’Economie a été l’exemption des supermarchés de cet étiquetage obligatoire, soi-disant à cause du manque de main-d’œuvre. Depuis, l’obligation a été rétablie, mais on voit clairement dans de nombreuses enseignes une tendance croissante à négliger ou ignorer la loi.
Cette méthode musclée israélienne consistant à fixer les faits sur le terrain pour imposer une nouvelle réalité au consommateur, ne doit pas être ignorée. D’une part c’est vrai que ce système d’étiquetage individuel pour chaque produit est vieillot et peu adapté, mais d’autre part, à chaque fois que le gouvernement tente de proposer des solutions plus technologiques - appliquées dans tous les pays développés - d’étiquetage numérique, les magasins, dans lesquelles l’expérience d’achat est déjà une des pires du monde, protestent contre le surcoût. Rappelons que la marge nette des grandes enseignes israélienne est de plus du triple de celle qui est la norme en Europe. Entre les prix exagéré imposés à la caisse et sans information préalable aux consommateurs et les économies de main-d’œuvre réalisée grâce à l’absence délibérée d’étiquetage des produits, les supermarchés et leur profits ont de beaux jours devant eux.
🛒Le rêve Spar rétrécit à vue d’oeil
Après avoir annoncé lors de son lancement l’année dernière l’ouverture de 35 magasins dans les cinq ans, l’enseigne néerlandaise Spar est bloquée à … un magasin, à Kfar Saba. Ce géant de la distribution qui possède 13.500 points de vente dans 49 pays a été lui aussi, comme Carrefour, désagréablement surpris par la dure réalité israélienne.
Non seulement l’ouverture d’un deuxième magasin à Beer Sheva prévue cette année a été repoussé à une date non précisée, mais le propriétaire de la franchise, Amit Zeev a mis fin à sa collaboration avec son principal investisseur Itshak Mirilashvili, propriétaire entre autres de la chaîne 14, après le retrait de Shufersal l’année dernière, et a licencié près d’un tiers du personnel. On voudrait saboter toute possibilité de concurrence en Israël qu’on ne s’y prendrait pas autrement.
🎙️Pour en savoir plus
La guerre coûte cher et nos ennemis ont investi des milliards de dollars dans un arsenal très sophistiqué. Revue de détail au micro de Yael Bornstein sur Kan en Français.
Un point crucial non mentionne dans l'article : le coût mensuel fixe de chaque société alternative (vs. le coût bimensuel fixe de la chevrat hachashmal).
On peux reperdre facilement l'économie realisee à cause de ça !
Donc demandez a chaque societe alternative quel est leur ce cout fixe (mensuel) total TTC, et comparez avec le cout fixe TTC apparaissant sur votre facture e la chevrat hachashmal (pour 2 mois, donc divisez par 2 pour pouvoir comparer).
Behatslacha et shana tova a tous !